Titre de séjour en France : les rendez-vous en préfecture se vendent au marché noir
L’obtention d’un titre de séjour reste la préoccupation principale de nombreux étrangers installés en France. Avec une politique de plus en plus anti-migratoire adoptée par le nouveau gouvernement français, décrocher le précieux document devient de plus en plus difficile.
Le processus est cependant encore plus ardu au niveau de certaines préfectures où l’obtention d’un titre de séjour relève de l’exploit, si ce n’est du miracle, aux yeux de certains demandeurs qui en ont pourtant besoin pour poursuivre leurs études ou leurs activités professionnelles.
À la préfecture de l’Isère (Grenoble), l’obtention d’un titre de séjour semble plus difficile que jamais, notamment depuis que le service de l’État a instauré l’exigence de décrocher d’abord un rendez-vous pour déposer une demande de titre de séjour.
Préfecture de l’Isère : « On rêvait de titre de séjour, maintenant on rêve de rendez-vous »
Ce passage au tout numérique est présenté par la préfecture de l’Isère comme étant une démarche qui vise à « sécuriser l’ensemble du processus de délivrance » et à « améliorer les délais d’obtention des titres de droit au séjour », lit-on sur le site web du service de l’État français.
Toutefois, du côté des demandeurs, cette mesure est à l’origine d’un véritable calvaire. Ils se heurtent en effet à une grande difficulté de décrocher un rendez-vous pour le dépôt de leurs demandes d’un titre de séjour en ligne, et ce, bien qu’ils essayent pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois pour certains parmi eux.
La préfecture de l’Isère indique que « le nombre de créneaux de rendez-vous disponibles est adapté à l’accueil des 15 000 ressortissants étrangers (par an) ». Un chiffre qui n’est visiblement pas suffisant.
Un problème auquel s’ajoutent des dysfonctionnements de la plateforme de prise de rendez-vous que le service de l’État justifie par « des actes malveillants ».
« Avant, on rêvait d’un titre de séjour, maintenant seulement d’un rendez-vous », résume Faouzi, un Algérien de France qui se bat pour décrocher un rendez-vous pour déposer une demande de titre de séjour pour sa femme, a-t-il confié au journal Français Le Dauphiné.
Pénurie de rendez-vous : les demandeurs de titre de séjour se tournent vers le marché noir
Hugo, d’origine mexicaine qui travaille en tant que sismologue en France, confie quant à lui à France Bleu qu’il a énormément de mal à décrocher un rendez-vous en ligne du fait de leur rareté mais aussi parce qu’il est malvoyant.
Il explique qu’il a demandé à ses amis d’aller sur le site et de tenter tous de lui décrocher un rendez-vous. Mais malgré cet effort collectif, cet étranger qui souhaite régulariser sa situation en France n’a décroché son rendez-vous qu’après trois mois d’attente.
L’obtention d’un simple rendez-vous, qui est pourtant un droit totalement gratuit, est devenue maintenant pour les étrangers dépendant de la préfecture de l’Isère, une denrée rare, qui s’achète au prix cher. En effet, les précieux rendez-vous pour le dépôt d’une demande de titre de séjour se vendent désormais au marché noir.
Face à la pénurie de rendez-vous, les demandeurs de titre de séjour, notamment les travailleurs et les étudiants, n’ont d’autres choix que celui de se jeter dans les bras de certains vendeurs peu scrupuleux qui n’hésitent pas à profiter de leur détresse.
Titre de séjour : jusqu’à 100 € le rendez-vous
Stéphane Dezalée, co-président de la Cimade à Grenoble, explique que certaines personnes guettent que les rendez-vous soient mis en ligne pour les réserver et les revendre aux demandeurs. Les tarifs se situent entre 50 et 100 € le rendez-vous, dévoile-il.
Il s’agit pourtant d’un service gratuit, dénonce l’activiste qui réclame « plus de créneaux » et qui estime que « c’est inadmissible » que des personnes, notamment celles qui vivent dans la précarité, payent de telles sommes pour simplement déposer un dossier.
Un dépôt de dossier dont l’issue n’est d’ailleurs pas toujours favorable. Max, un étudiant ivoirien, a déposé son dossier en mai dernier, mais ce dernier est toujours en instruction. « On me demande toujours les mêmes documents », déplore cet étranger qui a besoin de son titre de séjour pour commencer un stage.
La préfecture de l’Isère indique que le délai moyen de traitement pour un dossier complet de demande de titre de séjour étudiant est de trois mois et demi. Pour les demandes de titre de séjour travailleur, le délai d’attente moyen est de deux mois et demi.
Enfin, pour les demandes de titre de séjour portant la mention Vie privée et familiale, le délai moyen de traitement est de sept mois et demi. « L’effort des services se poursuit concernant ces délais », souligne la préfecture du 38.