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« Que tu réussisses ou non, ils ne t’aiment pas », tel est le constat amer de Nassim Hamdi, pilote de ligne franco-algérien de 33 ans.

Originaire de la cité Allende à Saint-Denis, en banlieue parisienne, il revient sur les préjugés et autres stigmatisations qui l’accompagnent encore aujourd’hui.

Sur les réseaux sociaux, où il devient une vraie star du cockpit, Nassim partage son quotidien de pilote avec quelque 50.000 fans, mais les attaques sont toujours de la partie.

Racisme et insultes en ligne : « Leur but est d’attiser la haine »

En plus des messages d’encouragement, des commentaires haineux remplissent l’espace sous ses vidéos : « Kamikaze comme ses compatriotes islamiques », « Cachez la tour Eiffel », « Même quand ils réussissent, ils volent ».

Des insultes qui n’en finissent pas, mais le pilote de ligne relativise. Il déclare dans les lignes du journal L’Humanité : « Heureusement, il y en a des bienveillants ».

Il réagit de la même manière en voyant un commentaire avec une image des tours jumelles, une énième insulte raciste et islamophobe. « Leur but est d’attiser la haine. Ils sont frustrés. Je préfère ne pas leur accorder mon temps ».

Bien sûr, la discrimination ne s’arrête pas au virtuel. Nassim Hamdi révèle aussi des incidents sur son lieu de travail : quand un collègue le prend de haut et le traite de « racaille », un autre le surnomme « Aladin » et lui propose du « lait de chameau ».

Et pour faire passer la pilule ? On lui prétexte une blague, « on rigole ! », entend-il régulièrement en réponse. Face à cela, Nassim dédramatise : « Je ne peux pas lui en vouloir, il nous connaît à travers CNews ».

Pilote Air Algérie destinations préférées

Un pilote à bord d'un avion / Par Jorge Ferreiro / Adobe Stock pour VVA - Visas & Voyages
Pilote Air Algérie destinations préférées

Un pilote à bord d’un avion / Par Jorge Ferreiro / Adobe Stock pour VVA – Visas & Voyages

« Dès que tu parles, tu es catalogué »

Eh oui, malgré sa réussite sociale, le pilote d’origine algérienne est encore victime des préjugés. En France, tout pousse dans ce sens : les médias, les espaces publics et même les relations professionnelles.

Nassim essaie pourtant de garder la tête froide, ne jamais répondre aux provocations, et elles remontent à loin.

Lui qui est né et a grandi à Saint-Denis n’a jamais dissimulé son origine, ni ses racines algériennes ni son accent de banlieue. « Entre la tête et l’accent de banlieue, dès que tu parles, tu es catalogué », se désole-t-il.

C’est son frère qui l’encourage à gommer certains traits, à prendre des cours d’éloquence ou même à porter des lunettes pour que « les professeurs l’aient à la bonne ».

Cela devait faciliter son accès aux grandes écoles, mais Nassim ne l’entendait pas de cette oreille. Il choisira de ne pas renier son identité.

Pour réussir en France, « il faut avoir la rage de donner le double »

À l’âge de 24 ans, il part se former en Catalogne, en Espagne, où la formation de pilote coûtait moins cher qu’en France (49.000 €). Pour y arriver, il économise comme livreur pendant 2 ans, et reçoit l’aide de son frère ingénieur et de ses parents, son père ouvrier et sa mère dactylographe.

Aujourd’hui, Nassim se complait dans sa fonction de pilote de ligne, mais il n’oublie pas d’où il vient. Il retourne régulièrement dans son ancien quartier, dans les établissements scolaires, pour susciter des vocations.

Après tout, il sait mieux que quiconque comment sont orientés les enfants de banlieue : « Quand tu grandis là, tu ne connais personne dans l’aviation qui peut t’orienter ».

De son côté, sa mère, Latifa, résume le prix de la réussite en France : « Il faut avoir la rage de donner le double ».

 

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