Inconsolable, une mère algérienne raconte au journal The Guardian la manière dont sa famille a été complètement déchirée par les traversées clandestines de la Méditerranée. Â
Aujourd’hui, elle s’occupe seule de ses quatre petits-enfants, après que les traversées de la mort vers l’Europe et « les passeurs » ont déchiré sa famille, en causant la mort de ses deux filles. Â
L’histoire tragique de cette famille algérienne remonte au mois d’octobre 2021, lorsque la fille cadette de Zahia, Feryal, alors âgée de 23 ans, a décidé de quitter l’Algérie avec son mari et leur fils âgé de 2 ans, témoigne la mère dans un article paru dans le journal The Guardian ce mercredi 27 août.
« Elle ne m’a jamais dit qu’elle allait émigrer illégalement »
La petite famille de Feryel aurait payé l’équivalent de 5.000 euros pour rejoindre les îles Baléares, au large de la côte est de l’Espagne, à bord d’une traversée clandestine. La mère, originaire de la ville de Bou Smail (Tipasa) n’a aucune idée de la manière dont sa fille allait faire ce voyage.
« Elle m’a dit qu’elle partirait avec des documents officiels et que l’organisateur du voyage lui procurerait un passeport. Elle ne m’a jamais dit qu’elle allait émigrer illégalement », témoigne-t-elle.
Son autre fille, Siham, âgé alors de 27 ans, avait reçu une photo de sa sÅ“ur juste avant le départ de l’embarcation. C’est le dernier message que la famille a reçu. Pendant plusieurs jours, aucun des participants à cette traversée clandestine n’a donné signe de vie. Par la suite, des messages postés sur les réseaux sociaux faisaient état de la disparition d’une embarcation partie de l’Algérie vers les îles Baléares.
Siham a fini par obtenir des photos prises lors de l’autopsie de sa sÅ“ur
Siham, la sÅ“ur, commence alors à contacter des militants, des organisations et d’autres Algériens vivant en Espagne dans l’espoir d’avoir des informations. Le 21 octobre 2021, un journal local espagnol rapporte que deux corps en décomposition ont été retrouvés, l’un d’une femme et l’autre d’un homme.
Certains ont soupçonné que l’un des corps pouvait appartenir à Feryal, bien qu’il n’y ait eu aucune confirmation officielle. À l’issue de plusieurs prises de contact avec des organisations, Siham a fini par obtenir des photos prises lors de l’autopsie de sa sÅ“ur par un ancien employé d’une ONG.
Selon sa mère, ces images l’ont immédiatement plongée dans un état de choc et d’effondrement émotionnel. Après avoir identifié le corps de sa sÅ“ur, les autorités sont intervenues et ont réclamé un test ADN.
Affectée par les photos de sa sœur, Siham met fin à ses jours en 2024
La procédure a pris plusieurs mois pour confirmer l’identité de Feryal et encore plus de temps pour que la procédure de rapatriement soit achevée. Le corps a finalement été rapatrié en Algérie en mars 2023, selon toujours le témoignage de sa mère. Les corps de son mari et de son fil n’ont jamais été retrouvés.
Siham ne s’est jamais remise après avoir vu les photos du corps de sa sÅ“ur. « Ma fille n’a pas supporté ces photos. Elle est tombée dans une profonde dépression. Elle ne m’a pas tout dit pour ne pas m’inquiéter. Elle a gardé toute sa douleur pour elle ».
En 2024, Siham a mis fin à ses jours, laissant derrière elle ses quatre enfants. La mère, inconsolable, en veut terriblement aux passeurs et à ceux qui exploitent la déstresse des familles à la recherche de leurs proches disparus dans les traversées de la mort.Â